Fin septembre s’est tenue la soirée d’inauguration des nouveaux studios de Plateau Virtuel, un espace de 1200m2, Porte de Versailles. Anciennement situés à Longjumeau chez Novelty, le groupe de Plateau Virtuel se trouve désormais à Paris même, ce qui constitue un changement important et un énorme avantage pour de nombreux tournages.

 

La soirée a commencé par une présentation de Bruno Corsini, l’éclairagiste et associé de Plateau Virtuel. Les décors assemblés sur Unreal Engine (moteur de création de jeux vidéo en 3D) sont projetés en temps réel sur des dalles LED liées entre elles pour former un grand écran incurvé. Grâce à un système de tracking, les perspectives du décor (parallaxe) changent en même temps que la caméra qui se déplace, créant une illusion de continuité entre le premier plan et le décor projeté.
En plus de l’écran vertical face caméra se trouve également un plafond d’écrans LED qui génère un retour de couleurs de l’environnement du décor, ainsi que des reflets sur des surfaces réfléchissantes, comme des voitures ou des lunettes par exemple. Combiné à Unreal Engine, le logiciel Smode permet de faire abstraction des bords de l’écran, et partant de filmer une extension virtuelle du décor, au-delà des bords pour des plans larges; Les acteurs peuvent aussi passer derrière des objets virtuels recréés en 3D.

Vidéos de démonstration et plus d’informations sur le site de Plateau Virtuel.

 

Crédit photo : Nicolas Pradeau

 

Une Arri Amira autotrackée était installée sur travelling pendant la soirée, équipée d’une optique Laowa OOOM 25-100, et des moniteurs étaient disposés dans la salle afin de montrer comment le décor réagissait lors de ses déplacements.

En plus de cela, un système adapté aux téléphones a été mis en place à l’aide d’une cage équipée d’un tracker pour que nous puissions interagir avec le décor et garder des images de ces tests. Ces derniers ont permis de se rendre compte, sur le moment, des contraintes et des avantages du plateau virtuel, et de pouvoir observer la réactivité des décors, la plage dynamique, le contraste, l’aliasing, le flicker ou encore les reflets de sources plus ou moins dures sur l’écran.

 

Bruno Corsini présentant la cage de téléphone équipée d’un tracker

 

Les écrans sont totalement démontables et de fait transportables sur un tournage, pour les utiliser sur une découverte par exemple, à travers une fenêtre. A condition de pouvoir recréer une zone de tracking sur place à l’aide de plusieurs bornes OptiTrack installées au plafond, détectant la position de la caméra (si l’on souhaite que les perspectives changent, ce qui n’est pas forcément nécessaire si le décor de la découverte est supposé être lointain).
Parmi les fonctionnalités récentes, il est désormais possible de tourner jusqu’à une cadence de 50 im/sec, ainsi que de tourner à plusieurs caméras. Les perspectives du décor s’adaptent en fonction de la caméra choisie, en direct, au moment de la commutation. Des réflexions sur la mise au point et une graduation de la profondeur de champ au sein des décors projetés sont en cours avec Arri. Leurs commandes de point Hi-5 pourraient par exemple bientôt communiquer avec le décor en temps réel.

 

L’équipe de techniciens et d’opérateurs Unreal Engine, écrans LED et OptiTrack

 

Les écrans LED de Plateau Virtuel offrent de nouvelles possibilités en fiction, en clip ou en pub. Ce qui est compliqué avec des fonds verts ou bleus, c’est de les éclairer, d’éviter un retour vert ou bleu sur les personnages mais surtout, de ne pas voir les décors que l’on y incrustera plus tard. Sur un plateau virtuel en revanche, la luminosité des écrans LED face caméra et au plafond raccorde avec la luminosité et la chrominance de l’environnement. C’est une solution très intéressante pour les séquences en voiture ou celles nécessitant une recréation d’effets de lumière sur les personnages; plus particulièrement la lumière en mouvement comme par exemple un effet de feu. En combinant judicieusement projecteurs et écran, il devient possible d’obtenir un effet feu réaliste sur des gros plans, avec des ombres mobiles et des reflets de flammes, et non un simple vacillement au dimmer ou au réflecteur.

 

En revanche, filmer devant un écran implique d’autres contraintes et facteurs à prendre en compte, comme le réalisme. En effet, si la mise au point est effectuée sur l’écran, il y a un risque de moiré. Par contre, si la profondeur de champ est réduite, et que le fond vertical est flou, cela crée un aplat de flou non graduel – le même niveau de flou pour les objets censés être proches et les objets censés être loin; L’on ressent alors la présence d’un écran et non d’un décor réel. De plus, du fait de la vitesse de calcul du logiciel, la cadence de prise de vues est pour l’instant plafonnée à 50 im/sec. 

 

Un tournage sur décor virtuel est une solution qui ne remplace évidemment pas le fond vert mais offre des possibilités complémentaires. Cela demande beaucoup de préparation, de réflexion et de tests en amont du tournage, notamment pour tourner les pelures au préalable. En revanche, cela peut permettre d’économiser énormément en termes de moyens humains, matériels et logistiques au tournage, ainsi qu’en post-production. Cela amène également un certain confort d’immersion non négligeable à la mise en scène et au jeu d’acteur, impactant directement le résultat final, permettant aussi de tourner plus vite et plus efficacement.