Le festival Camerimage, on en parle à l’Union depuis longtemps. Alors depuis 2 jours on est parti à Toruń, ça y est, on y est!
Bon enfin pas vraiment…. mais un peu quand même.
Je rêvais de retrouver les grands écrans, les files d’attente pour voir les films, j’avais pensé qu’on boirait peut-être même de la vodka ensemble pour se réchauffer le soir, au final on a opté pour un groupe Whatsapp et une accréditation pour un festival virtuel. Le monde change, donc…
Lundi 16 novembre j’avais réservé mon ticket pour Öndög (sorti en France à l’été 2020, sous le titre La Femme des steppes, le flic et l’œuf), un film de Quanan Wang photographié par Aymerick Pilarski, AFC.
Öndög (l’œuf, en mongol): l’origine de tout.
Le plan d’ouverture du film est grandiose : un long plan séquence de 3′ au coucher du soleil.
Les phares d’une voiture qui roule dans la steppe au crépuscule éclairent ce qui pourrait être un tableau. Des herbes folles de couleur orangée bougent dans le vent, avec au loin l’horizon. Dans la voiture des hommes discutent de l’instinct des chasseurs, des loups et de chiens… On voit passer des chevaux sauvages, on est presque dans l’abstraction, on commence à se faire avaler petit à petit par la nature.
« Ce que nous voyons avec les yeux humains n’est pas toujours la réalité » dit l’un. Le plan continue, les phares éclairent toujours la nuit et tout à coup, dans cette nuit au milieu de nulle part, apparaît le cadavre d’une femme nue, seule au milieu de la steppe. Trois minutes qui nous aspirent dans la nature : le film sera un voyage poétique dans la steppe.
Un polar, donc, avec un meurtre. Pour la suite il ne sera plus question que de l’essentiel, ici tout est épuré : le décor de la steppe toujours et l’infinitude de l’horizon au loin.
Une histoire d’amour, une femme et un jeune policier.
La lumière naturelle, le jour, la nuit.
À l’heure où nous sommes enfermés ici chez nous, là-bas tout est ouvert, il semble n’y avoir aucune limite.
Un film épuré jusqu’à la moelle (comme dit notre ami Pascal Montjovent) qui mélange l’amour, la mort, la vie. C’est beau à couper le souffle et derrière il y a toujours le soleil à la lisière de la ligne d’horizon. On est proche de la façon dont Terrence Malick filme la nature, je pensais qu’il était le seul réalisateur à savoir filmer le vent, maintenant ils sont au moins deux.
Dans un entretien, le chef opérateur Aymerick Pilarski, AFC explique que le film a été tourné avec une Alexa Mini. « Nous avons eu un peu le privilège des tournages à la Terrence Malick, dans le sens où la plupart des plans extérieurs ont été tournés aux levers et couchers de soleil. C’était d’un commun accord avec le réalisateur. Le soleil ne monte jamais très haut à cette époque de l’année mais les couleurs changent de jour en jour, ce qui est un problème pour la continuité des plans séquences, qui ont dû quelquefois être retournés sur plusieurs jours pour avoir la séquence entière dans un environnement lumineux homogène.
La journée nous étions occupés mais il fallait être prêts pour le bon moment au coucher du soleil, où l’on savait qu’on ne pourrait faire que 2 prises maximum. Pour la première séquence nous l’avons retournée sur 4 jours différents. »
Un tournage presqu’exclusivement en lumière naturelle, à part quelques projecteurs sur batterie. Par -35° (le tournage a eu lieu en janvier en Mongolie), les batteries ne tenaient pas longtemps. L’image est aussi épurée que la narration du film, tourné principalement en Cooke S5/i pour les longs plans larges et en Angénieux 19.5-94mm et 28-340mm pour les plans rapprochés.
La nature et les animaux sont partout. Il y a une séquence incroyable où la bergère et le jeune policier sont adossés la nuit à un chameau et où avant de faire l’amour avec le policier pour la première fois, la bergère lui dit, pour qu’il change de point de vue et qu’il apprivoise toute cette nature omniprésente : « Imagine que tu sois un loup »…
VERSION ANGLAISE
The Camerimage festival, at l’Union, we’ve talked about it for a long time. And, finally, for the last two days, we’re finally here!
Well not really…. But a little bit, sort of.
I dreamt of big screens and queuing to see the movies, I thought we might even drink vodka together to warm up in the evening. In the end we settled for a Whatsapp group and an accreditation for a virtual festival. How the world is changing.
On Monday, November 16th I had booked my ticket for Öndög (released in France during the summer of 2020, under the title La Femme des steppes, le flic et l’oeuf), a Quanan Wang film photographed by Aymerick Pilarski, AFC.
Öndög (the egg, in Mongolian) : the origin of everything.
The opening shot of the film is grandiose : a long 3′ sequence shot at sunset.
The headlights of a car driving through the steppe at dusk illuminate what could be a painting. Crazy orange-colored grasses move in the wind, with the horizon in the distance. In the car men discuss the instincts of hunters, wolves and dogs… We see wild horses passing by, we are almost in abstraction and we start to be swallowed, little by little, by nature.
« What we see with human eyes is not always reality, » says one. The shot goes on, the headlights still light up the night and suddenly, in this night in the middle of nowhere, appears the corpse of a naked woman, alone in the middle of the steppe. Three minutes that suck us into nature: the film will be a poetic journey through the steppe.
A thriller, therefore, with a murder. For the remainder of the film it will only be a question of what’s essential – here all is purity: the constant location of the steppe and the infinite horizon in the distance.
A love story between a woman and a young policeman.
Natural light, day and night.
At a time when we are locked down here at home, over there everything is open, there seems to be no limit.
A film pure to the marrow (as our friend Pascal Montjovent says) that mixes love, death and life. It is breathtakingly beautiful and behind it there is always the sun on the edge of the horizon. It’s similar to how Terrence Malick films nature, I thought he was the only director who knew how to film the wind, now there are at least two of them.
In an interview, AFC cinematographer Aymerick Pilarski explained that the film was shot with an Alexa Mini. « We had a bit of a Terrence Malick style of shooting, in the sense that most of the outside shots were shot at sunrise and sunset. We agreed on this with the director. The sun never rises very high at that time of year but the colors change from day to day, which is a problem for the continuity of the long master shots, which sometimes had to be reshot over several days to get the light of the whole scene to match.
During the day we were busy but we had to be ready for the right moment at sunset, when we knew we could only do at most 2 takes. For the first scene we reshot it over 4 different days ».
A shoot almost exclusively in natural light, apart from a few battery-powered lamps. At -35° celsius (the shoot took place in January in Mongolia), the batteries didn’t last long. The image is as pure as the narration of the film, shot mainly on Cooke S5/i primes for the long wide shots and Angenieux 19.5-94mm and 28-340mm zooms for the close-ups.
Nature and wildlife are everywhere. There is an incredible scene where the shepherdess and the young policeman are leaning against a camel at night. Before making love with the policeman for the first time, the shepherdess says to him, to change his point of view and tame all this omnipresent nature : « Imagine that you are a wolf »…
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